Opéra de Pékin

L’opéra de Pékin a environ 150 ans d’histoire. L’empereur Qianlong de la dynastie des Qing s’intéressait beaucoup aux opéras locaux et ne manquait jamais d’en voir lors de ses tournées d’inspection dans le Jiangnan (région comprise entre Suzhou, Hangzhou et Shanghai).

En 1790, en l’honneur de ses 80 ans, il fit venir à Pékin des troupes d’opéras locaux. Dès lors, quatre troupes d’opéra de l’Anhui s’y fixèrent. L’opéra classique Kunqu, qui était en vogue au palais impérial et dans la haute société, fut peu à peu remplacé par l’opéra de l’Anhui, aux airs plus vigoureux et pleins de fraîcheur. En 1828, une troupe du Hubei arriva à Pékin. Les deux opéras locaux collaborèrent souvent sur la scène. Une même pièce associait des airs différents. La combinaison de ces deux genres théâtraux a produit un nouvel opéra : l’opéra de Pékin, qui progressa en assimilant largement les meilleures qualités d’autres opéras locaux.

L’opéra de Pékin constitue un art synthétique, un genre original qui combine le chant, la déclamation, le mime et le combat stylisé.

Les chants reposent sur deux airs : le Erhuang et le Xipi. Le Erhuang, air dominant, est combiné aux airs traditionnels du Hubei et de l’Anhui, tandis que le Xipi dérive d’un air du Nord-ouest. Les chants englobent aussi le Kunqiang, l’air le plus ancien de Chine et des ballades populaires du Nord. Dans certains opéras, ces divers airs sont mêlés et donnent des effets intéressants et harmonieux.

Les chants, bien que strictement codifiés, suivent des mélodies gracieuses et variées, qui expriment bien la psychologie des différents personnages.

La déclamation rythmée est divisée en Yunbai (dialogue rimé) et Jingbai (dialogue non rimé). Pour les grands drames ou drames historiques et les rôle principaux, on a le plus souvent recours au Yunbai, qui utilise les dialectes des provinces du Hubei et de l’Anhui. Pour les petites pièces populaires et les rôles secondaires (bouffon, jeune fille, enfant), on a recours au Jingbai, qui utilise le dialecte de Pékin.

L’opéra de Pékin est accompagné par des instruments de musique : les cordes et les vents pour les chants, les percussions pour soutenir l’action. Les instruments à corde comprennent le violon chinois (principal instrument d’accompagnement), le violon à deux cordes, la mandoline à quatre cordes en forme de lune, le Pipa (luth à quatre cordes), la guitare à trois cordes, et quelquefois le Suona (petite trompette) et la flûte, avec laquelle on exécute une musique typiquement chinoise.

Les instruments à percussion regroupent les gongs, cymbales et tambours de diverses dimensions ainsi que les planchettes en palissandre ou bambou. Un bon joueur de tambour, qui est chef d’orchestre en même temps, est capable, en fonction des jeux des acteurs, d’exprimer des émotions tantôt exaltées, tantôt apaisées.

Le jeu des acteurs utilise toute une série de gestes conventionnels extrêmement stylisés : démêlage de la barbe, rajustement de la coiffure, pied levé, amples mouvement de manches, etc. Les gestes des acteurs de l’opéra de Pékin ont été plus ou moins stylisés et remaniés, pour devenir généralement des signes relativement abstraits, des mouvements où l’exagération artistique confine au symbole.

Sans limitation de temps et de locaux, les acteurs donnent leur représentation en employant la méthode suggestive pour décrire la vie réelle. Les décors de l’opéra de Pékin sont très simples. Deux chaises et une table suffisent pour créer un décor.

Les mouvements du corps et les gestes des mains suggèrent l’ouverture ou la fermeture d’une porte, la montée ou la descente d’un escalier, l’escalade d’une montagne, un plongeon etc. Il suffit d’un fouet pour symboliser un cheval, et d’un aviron pour un bateau, deux roues ornées de drapeaux pour une voiture. Un tour de scène des acteurs représente un long trajet, quatre soldats et quatre généraux symbolisent une armée puissante, etc.

Sur une scène éclairée, les mouvements de ballet et d’acrobatie de deux acteurs donnent vraiment aux spectateurs l’impression qu’ils avancent à tâtons et luttent corps à corps dans l’obscurité la plus totale. Le milieu dans lequel l’action se déroule est entièrement créé par le jeu des acteurs. Avec le développement artistique de générations successives, les décors en relief du théâtre moderne sont devenus inutiles sur la scène de l’opéra de Pékin.

Les rôles des personnages dans l’opéra de Pékin se divisent en plusieurs catégories, bien définies selon les ages et les caractères :

Dan, qui joue le rôle féminin, se subdivise en Qingyi (femme entre deux ages) :

Huadan la jeune fille ou jeune femme coquette, brave et légère

Wudan ou Daomadan amazone intrépide et Laodan la vieille femme.

Sheng, qui joue le rôle masculin, se subdivise en Laosheng homme âgé à barbe Xiaosheng jeune premier et Wusheng le guerrier

Chou qui joue le rôle de l’homme honnête et respectable, à la partie centrale du visage peinte en blanc, dont le coté bouffon fait rire les spectateurs, se subdivise en Wenchou le civil et Wuchou le guerrier.

Jing ou Hualian, qui joue le rôle d’aventurier, héros, bandit ou autre, à caractère énergique et grossier, au visage peint de façon multicolore, se subdivise en Dahualian (spécialisé dans le chant) et Erhualian (spécialisé dans le jeu scénique).  

Selon les couleurs des masques, les spectateurs distinguent facilement les braves des félons. Ainsi, le rouge symbolise la loyauté et le courage ; le jaune, la perspicacité ; le blanc, la ruse ; le noir, la force ou l’intégrité.

Les rôles de dieux, monstres, fées ou fantômes se distinguent par leurs couleurs dorées et argentées.

Chaque catégorie de personnage a dans son jeu un répertoire de gestes particuliers. Le Xipi et le Erhuang sont les deux styles les plus courants dans l’opéra de Pékin, mais des générations d’acteurs célèbre ont apporté de nombreuses innovations aux jeux et aux chants selon le développement de action et de l’émotion propre à chaque rôle, formant ainsi différentes écoles.

Les costumes de l’opéra de Pékin sont d’une facture remarquable. Ils sont inspirés de ceux de l’époque de la dynastie des Ming, au XVème siècle. Les couleurs des costumes (rouge, vert, jaune, blanc, noir et bleu) sont différentes pour chaque personnage ; ils sont ainsi reconnaissables au premier coup d’oeil à leur costume brodé de motifs lumineux et multicolores. Les coiffures des rôles masculins et féminins sont somptueuses, principalement celles des personnages Dan.